Article des "Antennes", mars 2015

La consommation locale menacée par TAFTA

La zone euro, avec sa législation qui lui est propre, protège aujourd’hui les entreprises et producteurs européens des grandes multinationales. Avec 25% des richesses mondiales (PIB) et ses 750 millions de consommateurs potentiels, c’est une affaire bien alléchante pour les multinationales. Les militants d’ATTAC y sont très opposés. Nous les avons rencontrés.

Avec le projet TAFTA (1) s’ouvrent des négociations pour un grand marché transatlantique de libre-échange. Les défenseurs de ce traité vantent ses nombreux avantages économiques pour l’Europe et les États-Unis, d’autant plus en période de crise : gain de croissance, hausse des exportations…

Mais de plus en plus de voix se lèvent contre ce projet. 150 000 citoyens ont répondu à la consultation publique ouverte l’été 2014 par l’Union Européenne (un record pour cette procédure). Parmi eux, 97% considèrent que ce traité n’est pas à l’avantage de l’Europe.

Ce qui déplaît aux opposants, en particulier : le fait qu’une entreprise puisse, avec l’instauration de tribunaux privés, intenter un procès si elle considère qu’elle a un manque à gagné à cause d’une politique publique. La société Philip Morris, a ainsi déjà poursuivi à ce titre, l’Uruguay, l’Australie et le Canada, où ce genre de tribunaux sont en place, pour avoir mener des campagnes anti-tabac. A l’inverse, jamais ces États ne pourront exiger de la firme le remboursement des frais médicaux des fumeurs atteints de cancer.

Un autre enjeu, c’est l’harmonisation des normes commerciales aujourd’hui plus strictes en Europe qu’aux États-Unis. Dans le cas du secteur alimentaire, par exemple, la firme américaine Monsanto, qui produit 90% des semences transgéniques mondiales, souhaite depuis longtemps vendre ses graines sur le marché européen. Alors que le parlement européen s’est déjà prononcé contre les cultures OGM, l’alignement des normes européennes sur celles des États-Unis leur ouvrirait le marché, les traités européens (TAFTA) étant au-dessus des lois votés démocratiquement par le parlement européen.

Pour nous, qu’est-ce que TAFTA veut dire ?
Les collectivités locales pourraient se voir dans l’impossibilité de mener des politiques incitatives. Par exemple, une municipalité qui voudrait favoriser la production agricole locale, serait obligée de mettre en concurrence les offres des producteurs locaux avec celles des firmes américaines et de ne retenir comme seul critère de choix : le prix. En voulant privilégier le local, elle se verrait accuser de concurrence déloyale.

Le collectif « Stop TAFTA » est un des organismes les plus actifs en France contre ce traité. Quant à la mairie de Grenoble, elle s’est déclarée hors TAFTA à l’issu des élections européennes, à l’instar de plus de 240 autres collectivités française : action locale pour un changement global ?

La commune de Niozelles demande un moratoire

La commune de Niozelles a voté une motion demandant « un moratoire sur les négociations de l’AECG et du PTIC et la diffusion immédiate des éléments de la négociation. »

http://local.attac.org/attac38/spip/

(1) : TransAtlantic Free Trade Agreement – traité de libre-échange transatlantic

Aujourd’hui de nombreux accords commerciaux se font a l’Échelle internationale, entre États. Et cela peut provoquer des réactions des citoyens, au niveau local : Center Parcs.
Susan George pense qu’il faut agir localement en pensant globalement, il ne s’agit pas de défendre son territoire : « Action locale, pour un changement global »
Le libéralisme, une idéologie économique, a pour logique de déréglementer ou libéraliser, et d’ouvrir les marchés du monde : tendre a « globaliser » le marché mondial.
Des accords de ce type signés ou en cours de négociations : CETA (Ca - EU), TAFTA (UE – EU)
Tous le monde n’a pas le même poids dans les négociations, le lobbying avantage les grandes firmes : dans les négociations actuelles de l’accord TAFTA, le lobbying est composé a 90 % d’acteurs privés (entreprises) et a 6 % de représentants de la société civile : associations, ONG, syndicats.
Susan George parle aussi des subprimes : des banques ont volontairement créer des emprunts a risque dans l’unique but de le dissimuler parmi d’autres plus avantageux, et ainsi, le transferer vers une autre banque, comme un mistigris. Ainsi, la banque gagne un petit bénéfice lors de la vente, et n’a pas de soucis a se faire si son client ne rembourse pas son prêt.
Mais lors d’une crise, ces prêts a risques, en grandes quantités sont de véritables bombes, et Lehman Brothers en ayant accumulé un grand nombre, a été contrainte de fermer boutique !
Le but est de générer un bénéfice sur la vente d’un produit a priori invendable. Une fois vendu, la banque vendeuse n’a plus de soucis à se faire quant au risque que représente ce produit, et a empoché un bénéfice inespéré !
En 2008, ce sont les contribuables qui ont remboursé les dettes des banques, a hauteurs de milliards d’euros, sans quoi l’économie mondiale se serait effondrée sous le poids des subprimes devenus invendables.
Susan George critique cet aspect de la déréglementation : les avantages économiques existent certes, pour les Etats comme pour les entreprises, mais la fraude, la triche, devient aussi bien plus accessible, et les banques ne s’en sont pas privées.

Présentation d’ATTAC :
association d’éducation populaire : organisations de conférences et de débats, de mobilisations …
On organise des conférences/débat. On fait aussi des actions de rue.
On a un site autour de la finance, la guerre, les banques…soirées débat. Avec le cinéma on touche plus de gens.
On contacte tous les élus locaux pour leur demander quelle position ils auront. On critique la structure de négociation (le mandat est secret, on ne sait pas qui participe…).

Quels sont alors les retombées des accords de libre-échange au niveau local ?
 une municipalité qui lance un appel d’offre ne doit juger que sur le prix, le coût, la rentabilité, et ce dans un marchés élargit : ainsi se fait la stimulation de la concurrence, et seuls les vendeurs les plus attractifs pourront signer de juteux contrats et faire des bénéfices, les autres n’ont qu’à trouver un nouveau domaine de prédilection. Adieu petits producteurs locaux et bonjour les industries mécanisées, optimisée et de ce fait, bon marché.
Susan George s’inquiète des effets que pourraient avoir ce genre de pratiques dans le marché de l’éducation (les diplômes).
 le traité permettra également a des tribunaux privés, de régler des contentieux entre État et entreprise : ainsi, la firme Phillipe Morris réputée pour la production de cigarette a attaqué le Canada pour manque a gagné en raison d’une campagne de santé publique anti-tabac. Le problème, c’est que cela ne marche que dans un sens, un État ne peut pas demander a une entreprise de rembourser les degats de sa production sur l’environnement, si sur la santé publique ! Si Phillippe Morris se juge lésée par le Canada, qui nuit a son profit, elle peut exiger un dédommagement, mais le Canada ne peut exiger que Phillipe Morris prenne en charge les soins médicaux des patients souffrant d’un cancer suite a la consommation de cigarettes. Meme histoire en Uruguay et en Australie, toujours avec PM.
 Harmonisation des normes commerciales :Ex : les noix, on pourrait imaginer que des noix d’Amérique coûtent moins cher, une entreprise ou une collectivité, pourrait être vendue en priorité. Si nous avons demain des produits qui déferlent sur le marché à moitié prix, nos producteurs ne résisteront pas. Le libre échange n’est pas équilibré, ce n’est pas gagnant gagnant…
Par exemple, le vin est de plus en plus présenté en fonction du cépage et moins du territoire. C’est-à-dire, ce qui est de l’ordre du culturel devrait disparaître
La municipalité ne pourra plus passer systématiquement par les producteurs locaux.
Abolition des barrières tarifaires, Plus de taxe à l’importation.
Cette abolition, signifierait que notre agriculture ne serait plus protégée. Les traités interdiront les aides aux producteurs car cela sera considéré comme de la concurrence déloyale.
La sécurité sociale pourrait dans ce sens être remise en compte.
Par exemple,
l’OMC (organisation mondiale du commerce) est un genre de club, dans lequel seuls les pays qui ont accepté de libéraliser leur économies sont acceptés. L’intérêt c’est que tout le monde se spécialise dans le secteur où il est le plus performant (La Chine est reputée pour etre l’atelier du monde, l’Inde les bureaux du monde) pour en faire bénéficier à tous les autres et vice versa. Cependant, il est important de savoir que l’OMC n’a pas les moyens de contraindre un État à quoi que ce soit, elle n’a pas un rôle de gendarme.
Le constat d’ATTAC est que ce genre d’accords favorise toujours les économies les plus riches au détriment des plus pauvres… ainsi, lorsque des pays du tiers-monde demandaient l’aide du FMI par exemple, ce dernier lui imposait de libéraliser son économie avant de débloquer des fonds, et le pays a été contraint de vendre des terres habitées, a des exploitations minières occidentales, faute de quoi la crise économique empirerait : la crise économique a laissé place à une crise humanitaire...
ATTAC ne milite pas en faveur d’un protectionnisme aveugle, mais au moins contre la déréglementation commencées dans les années 1980 dans le sillage du néo-libéralisme. Il doit y avoir des représentants de la société civiles dans ce genre d’affaires !
Susan George se désole que malgré la mobilisation contre la signature du TAFTA, le fond de l’affaire reste trop technique pour les citoyens des États signataires, et a par exemple écrit une scène de théâtre pour expliquer les enjeux de manière plus accessible.

Le CETA : Canada – EU Trade Agreement a été signé, il sert de « modèle » aux négociations européennes autour du TAFTA / PTCI / TTIP = accord de libre échange transatlantique.
Ces accords sont accompagnés de calculs prouvant les bien faits du traité et selon les chiffres avancés, la signature entraînerait un gain d’une centaine de milliard d’euros dans l’économie européenne et une autre centaine de milliard dans l’économie mondiale. Les exportations européennes augmenteraient également de 6 % et les exportations américaines de 8 % ! a priori tous le monde est gagnant.
Ce que critique Attac, c’est que ces accords sont souvent à l’avantage du plus fort, ainsi l’île de Haïti est aujourd’hui contrainte d’importer toute sa nourriture, elle est devenue dépendante de son commerce extérieur...
Cependant, il existe en Europe un mécanisme d’initiative populaire afin de mettre un sujet a l’ordre du jour du parlement européen. Il faut réunir 1 million de signature, ce en puisant dans un nombre minimum d’État membre. Une pétition a été lancée, elle a rempli les conditions nécessaires, mais la commission européenne s’y est opposée, et a eu le dernier mot.
Dans nos préoccupations, l’éducation culturelle consiste à faire comprendre aux personnes que leur problématique s’intègre dans une problématique bien plus globale. Nous on est là pour attirer l’attention là-dessus.