Fontaine en Isère : « Les Moissons de la Liberté », avec Michel Etiévent

Dans le cadre du 70ème anniversaire de la nationalisation du gaz et de l’électricité, le syndicat CGT Mines-Énergie propose avec d’autres organisations et sous l’égide de la ville de Fontaine, une

Exposition « Les Moissons de la Liberté » et une conférence de Michel Étiévent,

historien (cf. invitation jointe) :

Mercredi 30 novembre 2016 - Salle Edmond Vigne – Fontaine
23, rue des Alpes – Tram A (arrêt Louis Maisonnat)

  • 18 h : inauguration de l’exposition « Les Moissons de la Liberté » réalisée par l’Institut d’Histoire Sociale Mines Énergies
  • 18 h 30 : conférence - débat donnée par Michel Étiévent, « Marcel Paul, Ambroise Croizat, ils changèrent le visage social de la France ».

Bref rappel historique

Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, la production et la distribution de l’électricité et du charbon, propriété de multiples sociétés privées (1 450 entreprises de production, de transport et de distribution d’énergie électrique !) sont gérées de manière dispersée. Dans le contexte de la reconstruction, l’organisation de ces secteurs stratégiques n’est plus adaptée. Nommé ministre de la Production industrielle dans le gouvernement dirigé par Charles de Gaulle, Marcel Paul, résistant déporté, ancien dirigeant de la CGT, défend fin mars 1946, à l’Assemblée nationale, le projet de loi de nationalisation de l’électricité et du gaz. Cette loi est finalement adoptée le 8 avril 1946. Elle comporte à la fois un volet économique et un volet social, lequel accorde un statut précurseur aux travailleurs de ces secteurs.
Cette loi de nationalisation est inspirée de l’un des volets du programme prévisionnel du Conseil National de la Résistance (CNR), adopté dans la clandestinité le 15 mars 1944. Ce programme intitulé « Les jours heureux », mentionne au plan économique dans sa partie II (« Mesures à appliquer dès la libération du territoire ») :
« - l’instauration d’une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l’éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l’économie ;
  une organisation rationnelle de l’économie assurant la subordination des intérêts particuliers à l’intérêt général et affranchie de la dictature professionnelle instaurée à l’image des États fascistes ;
  l’intensification de la production nationale selon les lignes d’un plan arrêté par l’État après consultation des représentants de tous les éléments de cette production ;
  le retour à la nation des grands moyens de production monopolisés, fruit du travail commun, des sources d’énergie, des richesses du sous-sol, des compagnies d’assurances et des grandes banques ;
  le développement et le soutien des coopératives de production, d’achats et de ventes, agricoles et artisanales ;
  le droit d’accès, dans le cadre de l’entreprise, aux fonctions de direction et d’administration, pour les ouvriers possédant les qualifications nécessaires, et la participation des travailleurs à la direction de l’économie. »
Eh oui, vous avez bien lu ce qui précède ?
Car depuis « le tournant de la rigueur » en mars 1983, les gouvernements successifs se sont employés à détricoter ces mesures progressistes. Et ce, sans attendre l’injonction de Denis Kessler (maoïste dans sa jeunesse comme Manuel Barroso…), vice-président du MEDEF à l’époque, injonction intitulée « Adieu, 1945, raccrochons notre pays au Monde ! » (revue Challenges, nº 94, 4 octobre 2007, cf. fichier joint). Il est énoncé notamment : « Le modèle social français est le pur produit du Conseil national de la Résistance. Un compromis entre gaullistes et communistes. Il est grand temps de le réformer, et le gouvernement s’y emploie. ». J’ajoute que le gouvernement d’alors, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, avait comme Premier ministre un dénommé François Fillon…
Note.
Sur le plan social, le programme du CNR mentionnait également :
« - le droit au travail et le droit au repos, notamment par le rétablissement et l’amélioration du régime contractuel du travail ;
  un rajustement important des salaires et la garantie d’un niveau de salaire et de traitement qui assure à chaque travailleur et à sa famille la sécurité, la dignité et la possibilité d’une vie pleinement humaine ;
  la garantie du pouvoir d’achat national par une politique tendant à la stabilité de la monnaie ;
  la reconstitution, dans ses libertés traditionnelles, d’un syndicalisme indépendant, doté de larges pouvoirs dans l’organisation de la vie économique et sociale ;
  un plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail, avec gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l’État ;
  la sécurité de l’emploi, la réglementation des conditions d’embauchage et de licenciement, le rétablissement des délégués d’atelier ;
  l’élévation et la sécurité du niveau de vie des travailleurs de la terre par une politique de prix agricoles rémunérateurs, améliorant et généralisant l’expérience de l’Office du blé, par une législation sociale accordant aux salariés agricoles les mêmes droits qu’aux salariés de l’industrie, par un système d’assurance contre les calamités agricoles, par l’établissement d’un juste statut du fermage et du métayage, par des facilités d’accession à la propriété pour les jeunes familles paysannes et par la réalisation d’un plan d’équipement rural ;
  une retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours […] »